vendredi 26 février 2021

En passant par le quartier de Croix-Paquet


 De toile en toile, on perçoit l’émotion renouvelée, dominante, que ressent l’artiste, devant la découverte, bien plus, au-delà du visuel, la pénétration de chacun des sites de cette saga picturale des collines lyonnaises dans laquelle elle s’engouffre irrésistiblement. 

En ce quartier, c’est aujourd’hui le printemps... 

En une perspective toujours déstabilisante, traduisant sans doute le paroxysme de son émotion, les maisons s’agitent, se trémoussent, frémissent de joie. Le jaune et l’orangé habillent leurs murs d’une lumière dont l’artiste recherche constamment l’éclat, la transparence du visible et aussi de l’invisible, sur lequel semble s’ouvrir comme autant de regards, le bleu profond des nombreuses fenêtres qui de leurs vitres reflètent le ciel. 

Du bas de la colline, la rue Romarin surgit et se déploie vers la montée Saint-Sébastien, en une large boucle enserrant la Place Croix-Paquet que traverse l’ondulation d’un escalier qui, dans son raccourci, creuse le relief pentu de la pelouse. S’en élèvent, comme s’ébrouant des froidures de l’hiver, noirs encore de ses gelures, quelques arbres que la saison tarde à revêtir de leurs frondaisons. Néanmoins ils participent de cette atmosphère festive du renouveau, élançant leurs ramures dénudées vers le ciel, du moins vers le sommet de la colline. Peut-être sont-ils le véritable sujet de ce tableau, comme un hosanna vers la lumière, de l’éternelle lumière dont ils sont l’universel symbole, l’universel intercesseur entre le terrestre séjour et le céleste infini. 

Et alors, dans ce sens, les voix des pierres n’auraient-elles pas murmuré à l’oreille de l’artiste qu’en ce lieu, au Moyen Age, fut érigée «la Croix-des-Rampeaux», des Rameaux dans le langage de l’époque. Abattue par les calvinistes au temps de la Réforme, elle fut relevée à celui de la Contre-Réforme par Jean Pasquet, bourgeois résidant à proximité, d’où la nouvelle appellation de Croix-Paquet. 

Elle disparut au XIXème siècle, aussi, les arbres aux branches étendues - sans une intention consciente, sans la volonté de l’artiste de les y substituer à la Croix ? – n’évoquent-ils pas une volition inconnue d’en perpétuer, en ce lieu, un signe christique ? 


Charles Gourdin


huile, 81x65 cm


machabelsky.com

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